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Un éSchleck Andy leçons

  C'est un pluvieux samedi de juillet. A Rotterdam vient de s'élancer un jeune homme de 24 ans. Le frêle ambassadeur du duché exprime alors sans peur ses ambitions, le jaune bille en tête. Ambitieuse au possible, une étoile luxembourgeoise s'en va ainsi parcourir 3641,9 kilomètres. Finalement pas si loin de ses ambitions, l'étoile n'a pas encore atteint la lune mais échoue parmi les plus beaux astres. Trois semaines plus tard, posé sur la deuxième marche du podium final, dix raisons suffisent à expliquer ce qui pourrait s'apparenter à un échec. Un enfant s'interroge sur les leçons à en tirer et de suite, ça paraît beaucoup plus évident.

« Hey, Andy ? Hé, Andy !
C'est une copine à moi qui m'a dit qu'tu t'appelais Andy ! Andy... »


Qu'avais-tu dans la tête au moment de t'élancer sur la chaussée mouillée du prologue néerlandais ?

En ce samedi 3 juillet, c'est une entrée en matière des plus classiques en ce qui concerne les grands tours. Quelques kilomètres comme pour chauffer les jambes encore endolories après de longues semaines d'entrainement. Pourtant, au lieu de ça, c'est une véritable claque que le luxembourgeois s'administre, seul, sans que rien n'y personne ne le lui ai demandé. Déjà plus d'une quarantaine de secondes de perdues sur un autre favoris, « el pistolero » Alberto Contador a déjà marqué de précieux points. Andy, l'an prochain, si quelqu'un te demande de progresser en contre-la-montre, dis lui oui …

Qu'est-ce qu'il lui a pris à Frank au moment de s'affaler sur ces fameux pavés tant redoutés ?

Alors que l'équipe des frères Schleck accélère sur la route d'Arenberg, en ce 6 juillet, on annonce un Schleck à terre. Un des deux frères luxembourgeois se voit abandonner, les deux inséparables vont devoir se quitter. Frank, clavicule cassée laisse son frère orphelin. Si Andy gagne de précieuses secondes sur ces routes pittoresques, il perd un coéquipier, son coéquipier. Dans la montagne, cela s'est fait sentir.

Dites-moi, Qu'avait-il Alberto Contador en ce 11 juillet vers la station d'Avoriaz ?

La première véritable arrivée en altitude du tour de France se profile à l'horizon. Quelques kilomètres d'ascension et de premières véritables indications. Lance Armstrong est à terre, à la Ramaz (col de 1ère catégorie), comme attrapé par une malchance qui ne l'avait jamais touché. Contador ne tourne pas les jambes comme à son habitude, les saxo bank ont isolé leur leader mais Andy Schleck se sent pousser des ailes. Il semble impatient, pourtant, il attend le dernier kilomètre pour reprendre 10 secondes à son rival espagnol. Andy, l'an prochain, si l'on te permet d'attaquer Contador de bonne heure pour lui reprendre de longues secondes, ne passe pas à côté …

Une question me taraude l'esprit, Saxo Bank, une équipe en fin de cycle, un bien pour un mal ?

On les croyait invincibles, on les pensait inaccessibles. Ne vous a-t-on jamais dit qu'il était possible de se tromper ? L'erreur est humaine, pardonnez nous. Il faut aussi dire que cette équipe danoise apparaît comme en fin de cycle mise à part son leader et un toujours aussi étonnant Fabian Cancellara. Incapable d'aider le cadet des frères Schleck en montagne, la formation de Bjarne Riis est peut-être finalement le talon d'Achille du luxembourgeois. Difficile de gagner seul dans un sport individuel qui se court en équipe.

Les Pyrénées à la fête. Alors, Ax 3 domaines, c'est peut-être encore les Alpes ?

Dimanche dernier, on entrait dans les pyrénées. Mises en exergue pour leur centenaire dans la grande messe de juillet, on s'attendait à un feu d'artifice. Pourtant, Alberto Contador et Andy Schleck, au-dessus du lot à la sortie des alpes n'en ont pas profité. Schleck a contrôlé, Contador a été incapable d'attaquer, tant pis pour nous, la grande bagarre attendra, l'attitude des coureurs, on ne la contrôle pas.

Et un dérailleur, ça se contrôle peut être ?

A quelques semaines du départ du tour de France, on a beaucoup entendu parler des mécaniciens de chez saxo bank. Vers Bagnères de Luchon aussi. Pourtant, là, on ne parle pas de vélos mécaniques. Un simple saut de chaine lorsque l'étoile luxembourgeoise décide de s'envoler et ce sont ses espoirs de victoire finale qui partent en poussière. Contador en profite, récupère le maillot jaune. Schleck doit réparer, seul, 39 secondes de perdues sur l'espagnol. Tiens donc, vous m'avez dit 39 secondes ?

Professeur, professeur, c'est quoi le panache ?

Sur la route de Pau, on se remémore la fabuleuse chevauchée d'Eddy Merckx à travers quelques « monstres » pyrénéens. Parti à 180 kilomètres de l'arrivée, le cannibale belge avait écrit sur ces routes en 1969 une des plus belles pages du tour de France. Cette année, sur un parcours similaire, aucun des favoris ne s'est découvert, par manque de panache, peut être. Tant pis pour eux, tant pis pour nous, tant mieux pour d'autres, le français Pierrick Fedrigo ne s'en plaindra pas, il accroche là à son palmarès une des plus belles étapes de sa carrière.

Aurait-il pu y avoir un scénario différend sur les pentes du Tourmalet ?

Les organisateurs souhaitaient un juge de paix. Ils souhaitaient un géant pour faire le différence. L'étape du Tourmalet sonnait comme LE sommet de l'édition 2010. Là encore, à l'instar de ce qu'il s'était passé vers Ax 3 Domaines, les deux grands de ce tour de France se neutralisent. Peut être Andy Schleck aurait dû faire travailler Cancellara dans la plaine, peut être aurait-il pu fatiguer, esseuler Contador en mettant Voigt ou bien encore O'Grady au travail avant de suivre le train de Fuglsang. Il ne l'a pas fait, avec regrets ? Qui sait, l'an prochain, il aura tout le loisir d'essayer autre chose.

Dit Andy, c'était sympa ce dernier contre-la-montre, n'est-ce pas ?

8 secondes de retard, 50 kilomètres face au vent, on pensait à un duel qui allait rapidement tourner court. Pourtant, 30 kilomètres durant, Andy Schleck nous a laissé croire à l'exploit. Dans les vignes de la région bordelaise, on aurait pu le retrouver ivre de bonheur, on le retrouve déçu mais loin d'être abattu. Andy Schleck n'était pas loin de l'exploit, au final, il se retrouve à 39 secondes au général. 39 secondes, vous en souvenez des mécaniciens de la saxo bank ? Le luxembourgeois s'est battu jusqu'au bout. Un contre-la-montre et puis s'en va, deuxième, il sait désormais là où il a perdu le tour. Mais finalement, n'a-t-il pas perdu parce qu'il devait perdre ?

Et si finalement il n'y avait rien d'autre à faire, si ce tour de France n'était autre qu'un grand cru ?

Avec un final dans les vignobles, le jeu de mot est facile, pourtant, c'est bel et bien de cela dont il s'agit. Cette année, on aura eu quelques beaux exploits français. Un Sylvain Chavanel sortant de son chapeau deux fabuleux numéros. Un natif des pays proches de la Loire, Charteau à pois pour le patrimoine. Quelques autres mousquetaires pour au final six superbes étapes. Ce tour était un grand cru. Contador et Schleck nous ont livré un magnifique duel. On cherche les raisons de l'échec du luxembourgeois dans sa quête de maillot jaune. Il ne faut peut-être pas aller chercher bien loin. Car l'aura des grands champions c'est peut-être aussi la capacité à triompher lorsque l'on est un peu plus mal. Or, personne ne pourra nier les talents éclectiques d'Alberto Contador, natif d'un pays, l'Espagne, qui ne cesse de gagner.

L'enfant en a terminé avec ses questions, il s'apprête à reprendre sa route. Sur le chemin du retour, on le voit fredonnant.

« Andy se hâte
Andy se méfie
Andy se tâte
Est-ce qu'il a envie ? »

Bien sûr qu'il en a envie, Andy. Mais il est un garçon poli. Andy est patient, cependant, qu'il ne tarde pas trop, le temps lui ne s'arrête pas sur demande. Alors Andy, retient la leçon. L'an prochain, n'attend pas d'avoir 10 raisons. Si sur le prochain tour il y en a encore la possibilité, si le maillot jaune promis peut être revêtu sur les champs-Elysées. Dans ce cas-là, Andy, l'an prochain, promets nous de dire oui ...

Simon Bernard




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