Pour les amateurs de cyclisme, si il y a un week-end à cocher dans l’année c’est Bien celui de Paris-Roubaix… Chaque saison, un beau dimanche d’avril, les meilleurs spécialistes des courses flandriennes se retrouvent ainsi dans le Nord-Pas-de-Calais. Enfin beau tout dépend. Mais le rendez-vous dominical de cette année aura en tout cas été d’une haute intensité. Un voyage en enfer d'une impressionnante cruauté à l'égard de ces champions affamés de pavés.

Ô diable qui en 1896 a créé une course dont la difficulté n’a cessé de s’accentuer. Et qui désormais est la chasse gardée de quelques spécialistes appelés flahutes. Ces hommes capables d’engranger les kilomètres sans se plaindre, à travers les bois, et au milieu d’anciens chemins miniers. Des chemins ne sont pas comme les autres, car carrossés à l’aide de pavés, de quoi faire trembler les jambes de nos 205 cyclistes affutés comme jamais. Et pour cause, « L’enfer du nord » comme on l’appelle de coutume chez les « cht’i » est la dernière classique flandrienne de l’année, celle pour laquelle chaque coureur s’est préparé, celle pour laquelle chaque coureur est décidé à tout tenter. La chute, elle ne les effraye pas, et si par hasard quelques-uns en ont peur, ils ne feront pas long feu dans la braise nordiste. Un chaudron dans lequel se massent chaque année des millions de supporters, avec un seul but voir l’un des siens l’emporter.

Et cette année, malgré la pluie annoncée, ils étaient très nombreux tout au long du parcours. De troisvilles au vélodrome en passant par Arenberg et le carrefour de l’arbre, la foule n’a pas été déçue par le spectacle. Un course menée sur les chapeaux de roues au cours des deux premières heures. Mais de là haut, le diable guettait sa propriété, avant d’apprécier l’échappée de trois hommes qui venaient de s’envoler, un instant de paradis qu’il leur fallait apprécier dans ce monde où l’ange à bien du mal à surmonter l'ardeur du démon pavé. Derrière, les équipiers faisaient le boulot pour des leaders bien au chaud et hésitant à se découvrir de sitôt. Le vent dans le dos, les jambes flageolantes, ces héros avare de routes goudronnées n’en avaient pas fini avec ces chemins secondaires pleins de pièges, et prêts à croquer ces géants dont le nord aime en avoir la propriété. C’est ainsi qu’arrive la célèbre tranchée d’Arenberg, vitrine de ce mythe, premier juge de paix qui ne cesse au fur et à mesure des années d’effectuer le premier écrémage.

Alors, les yeux grands ouverts sur le porche du chemin minier, le peloton d’étire, comme un château de carte une bonne dizaine de soldat s’effondre, par terre, affalé laissant s’en aller les premiers prisonniers d’une trouée qui ne laisse rien passer. Ainsi, Pozzatto et Flecha semblent hors combat à l’abord de la tranchée. Devant, Van summeren coéquipier de Leif Hoste accélère violement. Une fois de plus ce passage découvert par jean Stablonski aura fait son devoir. En sort un groupe d’une trentaine d’unités. Un peu plus loin, c’est un bataillon composé de 8 hommes qui s’extrait de ce groupe. Le bon coup, puisque composé des favoris ayant chacun un coéquipier mis à part Ballan esseulé. De son perchoir le diable surveille son enfer. C’est alors que Boonen, Ballan et Cancellara sortent à trois. Il faut trouver un juge de paix, ce sera sûrement comme chaque année le carrefour de l’arbre. Mais rien y fait les trois diablotins n’arrivent pas à se départager, le sprint est le seul à pouvoir choisir le vainqueur. A l’entrée sur le vélodrome de roubaix, la foule acclame les coureurs, marqués, les traits tirés, les jambes deviennent secondaires. La tête prend le dessus.

Pourtant, la logique est réspéctée et à 200 mètres lorsque le belge attaque le sprint est plié. Il se forge ainsi pour la seconde année de suite une place au paradis. La poussière, l'humidité et la distance n'auront pas eu raison de lui. De là-haut, le diable en a pris plein les yeux. Dans un nuage de courage pour des héros forçats du pavé « l'enfer » aura une nouvelle fois été ce qu'il doit être : un calvaire, chemin de croix pour les coureurs et leurs machines.

                                                                                                                     Simon Bernard

         

                pavés